Journée d'étude
Paris, Visioconférence
le 06 juin 2024, de 09H30 à 17H30

Journée d’étude | Søren Kierkegaard « Les Œuvres de l’amour »

Quelles sont les distinctions conceptuelles et philosophiques entre l'amour immédiat et l'amour chrétien dans la pensée Kierkegardienne ? Participez à la journée d'étude consacrée à l'ouvrage « Les Œuvres de l’amour » de Kierkegaard, co-organisée par la Faculté de Philosophie et la Société Søren Kierkegaard.

Søren Aabye Kierkegaard (1813 - 1855), ©Hulton Archive/Getty Images

Relire Les Œuvres de l’amour de Kierkegaard

En 1844, le pseudonyme Vigilius Haufniensis formulait dans Le Concept d’angoisse l’intérêt de déployer une « éthique seconde » laquelle ne serait pas fondée sur les éléments du paganisme, mais sur la dogmatique chrétienne. Exposée sous plusieurs aspects, cette dogmatique renvoie directement au péché originel et indirectement au Dieu sauveur. Si l’éthique qui devait lui être associée ne vit cependant jamais le jour en tant que telle, elle fut néanmoins esquissée dans Les Œuvres de l’amour.

Deux séries de discours publiées le 29 septembre 1847 constituent la trame de ce livre qui se donne pour tâche d’éclairer en chacun de ses éléments le commandement divin selon lequel « Tu dois aimer ton prochain » et la conception de l’amour spécifiquement chrétien.


La transfiguration de l'Amour dans la pensée Kierkegaardienne

Distinction entre l'amour immédiat et l'amour chrétien

À la racine du projet kierkegaardien se trouve la distinction entre l’amour immédiat, celui que chantent les poètes, et l’amour chrétien, qui ne peut naître que de l’obéissance au commandement. Alors que le premier est toujours dicté par l’amour de soi et ne peut donc échapper au tourment d’être ou de ne pas être soi, le second se porte vers le prochain lui-même et se libère des souffrances du temps pour rejoindre la paix de l’éternité. L’amour apparaît alors comme transfiguré : il n’est plus humain mais divin, conformément à la formule johannique (1 Jn 4, 8), il n’est plus temporel mais éternel, il a la forme d’un devoir et non plus celle d’un désir, le prochain y est reconnu en sa valeur absolue.

Perspectives éthiques, esthétiques et religieuses

Relire Les Œuvres de l’amour de Kierkegaard, c’est donc à fois investir la part spécifiquement éthique de la pensée kierkegaardienne, et c’est le faire à partir des méditations qui s’offrent dans la forme caractéristique du discours autonyme. Les perspectives ouvertes par ce livre sont donc nombreuses. Sur le plan théorique, il s’agira d’examiner le rapport établi par Kierkegaard entre la formulation de l’éthique chrétienne et le recours aux notions d’amour et de devoir.
  • Comment une éthique qui attribue la primauté et l’absoluité au devoir, sous une modalité toutefois distincte de la morale kantienne, s’articule-t-elle avec le commandement divin ?
     
  • Et comment cette conception éthique parvient à engager l’esthétique (en tant que le devoir est un pathos) et le religieux (en tant que le devoir procède du Dieu chrétien) ?
     
  • Qui sont les personnages de cette intrigue éthique (Tu, prochain, Dieu) ?


Analyser et interpréter le paradigme chrétien chez Kierkegaard

À ce premier enjeu théorique, s’ajoute une réflexion sur la portée et l’influence de cette proposition kierkegaardienne aussi bien en raison de son inscription dans la tradition de la morale déontologique — qui est toutefois subvertie — et en raison de la ressource exclusivement biblique, et plus précisément néotestamentaire, de ces méditations.

Sur le plan stylistique, la forme même de l’exposition des Œuvres de l’amour, qui est celle du discours, et que Kierkegaard pratique sous son propre nom, trouverait ainsi sa pleine justification : parce qu’elle est tirée de l’Écriture, l’éthique de l’amour ne semble pouvoir prendre d’autre forme textuelle que celle de la patiente interprétation du commandement et de ses illustrations.
Mais, dans une perspective critique, on se demandera si le paradigme chrétien tel que le présente Kierkegaard rejoue vraiment le sens de l’amour païen, notamment concernant le statut conféré au prochain. Nombre de critiques de la « doctrine kierkegaardienne de l’amour », selon l’expression d’Adorno, tendent en effet à nuancer cette supposée rupture et nourrissent une réception tumultueuse, aujourd’hui en voie d’être redécouverte, des Œuvres de l’amour.
 

Organisateurs

  • Emeline Durand, Université de Bourgogne, Société Søren Kierkegaard
  • Pierre-Alban Gutkin-Guinfolleau, Faculté de Philosophie, ICP, Société Søren Kierkegaard

Informations pratiques

Lieu(x) :
  • Paris
  • Visioconférence
Publié le 14 mai 2024 Mis à jour le 21 mai 2024

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